Touche pas a mon hydropote! (La 11ème fois sera la bonne)
Posté : jeu. 17 mars 2022 15:30
Pour un participant à un forum sur la chasse du grand gibier, je suis conscient de n’avoir raconté que des histoires de petit gibier ces derniers temps. Ce n’est pas que je ne suis pas allé à sa recherche, bien le contraire, je n’ai jamais autant chassé que depuis le début de la pandémie, le télétravail ayant des avantages en termes de flexibilité. Et surtout, après dix ans de chasse au grand gibier, j’ai maintenant quelques camarades de chasse avec des territoires relativement accessibles de chez moi. Ils sont d’autant plus généreux qu’ils ne peuvent pas savoir à l’avance que ma visite ne va pas leur coûter de gibier. Je vous fais grâce des onze sorties sur les derniers 30 mois qui ont fini en bredouille pour diverses raisons, pour passer directement a weekend dernier.
ATTENTION : CE RECIT COMPORTE DES SCENES DE REUSSITE CYNEGETIQUE. Vous voilà prévenus.
Si je n’ai pas chassé de grand gibier depuis plus de deux ans, j’avais quand même réussi à cueillir des champignons. Hors, j’ai rencontré un autre amateur (chose rare ici) lors d’une chasse au petit gibier cet hiver, qui m’a invité à venir chasser l’hydropote chez lui à l’occasion, ce qui est très généreux. Pour ceux qui ne connaissent pas, l’hydropote est un cervidé un peu plus petit que le chevreuil, originaire de la Chine du sud et de la péninsule coréenne, qui a été introduit au Royaume Uni au 19éme siècle, et qui s’est trouvé bien dans l’est et à une heure au nord de Londres. L’espèce a la particularité de n’avoir pas de bois, mais les mâles ont de longues canines acérées. Ils aiment les roseaux, les plaines, les estuaires, et se trouvent donc bien dans la région plate et basse de l’Angleterre, mais leur expansion potentielle est limitée par le biotope. Là où l’espèce est présente, c’est souvent en grand nombre. Ce qui était apparemment le cas du territoire de mon hôte. Je me suis dit que ça allait être fastoche. Parce que je n’apprends pas de mes erreurs.
Je suis arrivé juste avant l’aube, accueilli par une chouette effraie sur le parking du pub du coin. A 6h30, nous avons aperçu le premier hydropote couché au milieu des chaumes, et avons essayé de l’approcher en longeant l’autre côté d’une haie, mais il nous a senti, est parti en courant, s’est arrêté le temps que je puisse l’aligner dans la lunette de mon drilling, confirmer qu’il était trop loin, et que c’était un mâle remarquable avec des défenses très longues. Mais ils ne deviennent pas vieux en étant bêtes, et nous ne le reverrons plus. S’en suivirent deux heures de marche le long des haies et de champs en scrutant partout aux jumelles, mais pas l’ombre d’un hydropote. Par contre, j’ai vu dix lièvres qui gambadaient et broutaient ensemble au milieu d’un pâturage, ce que je n’avais encore jamais vu ! Mais à 8h30, nous avons changé de secteur.
Nous nous sommes dissimulés au pied d’une haie près d’une bande fourrage qui sert de couvert aux faisans et aux perdrix et dont mon hôte m’a assuré que les hydropotes étaient friands, il n’était que question de les attendre sans se faire remarquer. Mais après 20 minutes à fixer ce coin sans rien voir qu’un faisan, je me suis mis à jumeller autour, là où il n’y avait aucune chance qu’un hydropote se câche. Tenez, celui-là par exemple, dans l’étendue énorme de chaume devant nous, dont on voit les oreilles dépasser à 300m, que voulez-vous donc qu’il fasse là ? AH ! « EH ! Il y en a un là ! ». Mais comment Diable approcher cet animal en plein milieu d’un champ sans aucun couvert que les très douces ondulations du terrain ? Nous avons passé la demie-heure suivante à essayer de contourner le champ en restant sous la ligne de « crête » pour tenter d’arriver derrière l’hydropte à bon vent, et miracle ! nous avons retrouvé ses oreilles qui dépassaient au loin, toujours couché tranquillement. A partir de là, ça a été du quatre pattes pour arriver en position de tir. A environ 80m, j’ai pu m’asseoir avec le drilling sur les bâtons mais… pas de tir possible : on ne voyait que des oreilles et la croupe ! Pas grave. Je suis un homme patient. Je n’ai pas d’autres projets aujourd’hui. La bête finira bien par devoir se lever.<br/>
20220313_103232 by pinemarten, on Flickr
En fait, non, elle ne se levera pas...
Eh bien non. Deux heures plus tard, elle n’avait pas bougé d’un poil. Nous avons tenté quelques coups de Buttolo juste pour voir, rien à faire. Alors n’ayant rien à perdre, nous avons rampé à reculons et tenté de revenir d’un angle un peu différent dont nous espérions que peut-être nous pourrions trouver un angle de tir, mais à cause du vent il n’y avait pas beaucoup d’options. Contre toute attente, nous nous sommes retrouvés à 60m, mais toujours pas grand-chose qui dépasse ! Toutefois, il y avait une possibilité délicate : un tir en haut des épaules. Pas ordinaire sur un animal couché, pas idéal, délicat vu la position assise inconfortable, mais ça se tentait.
Drilling sur les batons, animal dans le croisillon, ca bouge un peu, ca derive toujours, enclencher le stecher, respirer, ca bouge un peu moins... BLAM! L'hydropote roule sur le coté, donne quelques coups de patte pendant une minute et c'est fini.
20220313_114555 by pinemarten, on Flickr
Immense soulagement d'avoir réussi un tir assez atypique apres une sequence qui aurait pu rater tant de fois. Merci a mon généreux amateur de champignons, merci a l'hydropote complaisant, et merci a Artemis avec qui ma brouille de deux ans et demi semble etre enfin terminée.
ATTENTION : CE RECIT COMPORTE DES SCENES DE REUSSITE CYNEGETIQUE. Vous voilà prévenus.
Si je n’ai pas chassé de grand gibier depuis plus de deux ans, j’avais quand même réussi à cueillir des champignons. Hors, j’ai rencontré un autre amateur (chose rare ici) lors d’une chasse au petit gibier cet hiver, qui m’a invité à venir chasser l’hydropote chez lui à l’occasion, ce qui est très généreux. Pour ceux qui ne connaissent pas, l’hydropote est un cervidé un peu plus petit que le chevreuil, originaire de la Chine du sud et de la péninsule coréenne, qui a été introduit au Royaume Uni au 19éme siècle, et qui s’est trouvé bien dans l’est et à une heure au nord de Londres. L’espèce a la particularité de n’avoir pas de bois, mais les mâles ont de longues canines acérées. Ils aiment les roseaux, les plaines, les estuaires, et se trouvent donc bien dans la région plate et basse de l’Angleterre, mais leur expansion potentielle est limitée par le biotope. Là où l’espèce est présente, c’est souvent en grand nombre. Ce qui était apparemment le cas du territoire de mon hôte. Je me suis dit que ça allait être fastoche. Parce que je n’apprends pas de mes erreurs.
Je suis arrivé juste avant l’aube, accueilli par une chouette effraie sur le parking du pub du coin. A 6h30, nous avons aperçu le premier hydropote couché au milieu des chaumes, et avons essayé de l’approcher en longeant l’autre côté d’une haie, mais il nous a senti, est parti en courant, s’est arrêté le temps que je puisse l’aligner dans la lunette de mon drilling, confirmer qu’il était trop loin, et que c’était un mâle remarquable avec des défenses très longues. Mais ils ne deviennent pas vieux en étant bêtes, et nous ne le reverrons plus. S’en suivirent deux heures de marche le long des haies et de champs en scrutant partout aux jumelles, mais pas l’ombre d’un hydropote. Par contre, j’ai vu dix lièvres qui gambadaient et broutaient ensemble au milieu d’un pâturage, ce que je n’avais encore jamais vu ! Mais à 8h30, nous avons changé de secteur.
Nous nous sommes dissimulés au pied d’une haie près d’une bande fourrage qui sert de couvert aux faisans et aux perdrix et dont mon hôte m’a assuré que les hydropotes étaient friands, il n’était que question de les attendre sans se faire remarquer. Mais après 20 minutes à fixer ce coin sans rien voir qu’un faisan, je me suis mis à jumeller autour, là où il n’y avait aucune chance qu’un hydropote se câche. Tenez, celui-là par exemple, dans l’étendue énorme de chaume devant nous, dont on voit les oreilles dépasser à 300m, que voulez-vous donc qu’il fasse là ? AH ! « EH ! Il y en a un là ! ». Mais comment Diable approcher cet animal en plein milieu d’un champ sans aucun couvert que les très douces ondulations du terrain ? Nous avons passé la demie-heure suivante à essayer de contourner le champ en restant sous la ligne de « crête » pour tenter d’arriver derrière l’hydropte à bon vent, et miracle ! nous avons retrouvé ses oreilles qui dépassaient au loin, toujours couché tranquillement. A partir de là, ça a été du quatre pattes pour arriver en position de tir. A environ 80m, j’ai pu m’asseoir avec le drilling sur les bâtons mais… pas de tir possible : on ne voyait que des oreilles et la croupe ! Pas grave. Je suis un homme patient. Je n’ai pas d’autres projets aujourd’hui. La bête finira bien par devoir se lever.<br/>
20220313_103232 by pinemarten, on FlickrEn fait, non, elle ne se levera pas...
Eh bien non. Deux heures plus tard, elle n’avait pas bougé d’un poil. Nous avons tenté quelques coups de Buttolo juste pour voir, rien à faire. Alors n’ayant rien à perdre, nous avons rampé à reculons et tenté de revenir d’un angle un peu différent dont nous espérions que peut-être nous pourrions trouver un angle de tir, mais à cause du vent il n’y avait pas beaucoup d’options. Contre toute attente, nous nous sommes retrouvés à 60m, mais toujours pas grand-chose qui dépasse ! Toutefois, il y avait une possibilité délicate : un tir en haut des épaules. Pas ordinaire sur un animal couché, pas idéal, délicat vu la position assise inconfortable, mais ça se tentait.
Drilling sur les batons, animal dans le croisillon, ca bouge un peu, ca derive toujours, enclencher le stecher, respirer, ca bouge un peu moins... BLAM! L'hydropote roule sur le coté, donne quelques coups de patte pendant une minute et c'est fini.
20220313_114555 by pinemarten, on FlickrImmense soulagement d'avoir réussi un tir assez atypique apres une sequence qui aurait pu rater tant de fois. Merci a mon généreux amateur de champignons, merci a l'hydropote complaisant, et merci a Artemis avec qui ma brouille de deux ans et demi semble etre enfin terminée.
