Vent arrière par un noroît sacrément établi, nous tombons sur le sud telle la misère sur les pauvres. Et c'est un véritable rassemblement de piqueurs que nous trouvons là, aussi nombreux ou presque que la piétaille des postés par destination qui, les jambes trop raides pour courir, ou le cerveau ou le jardin trop étroits pour y entasser toute une meute de chiens, ou pour toutes les raisons à la fois, préfèrent écouter la musique plutôt qu'écrire la partition.
Les adorables cadres de cette diane font leur maximum pour mettre fin à la litanie de mes peut-être quarante bredouilles en quatre saisons, et m'attribuent LE poste en or de la première traque. Quand j'y arrive un collègue un tout petit peu moins adorable, piqueur de son état ne piquant pas sur cette traque, est 50 mètres plus bas, déjà installé. C'est un peu se marcher dessus, chez nous. Lui et moi nous trouvons au bas d'un vaste U qui constitue la face nord du dispositif, et à peu près en son milieu. Sa base est adossée à un muret et des broussailles denses peu passibles de tir en arrière. La branche droite de la lettre comporte un seul tireur perché sur un bloc de Pierre, que nous appellerons le bloc d'André, car ils se prénomme en réalité ainsi. La branche gauche, côté vallée compte 6 ou sept nains jaunes, dont Pierre est le plus proche élément, juste après l'angle droit.. Tirer pour moi ne peut se faire qu'à courte distance, vers la traque et face à la colline (les piqueurs ne montreront leur nez qu'à la fin des hostilités) et éventuellement à ma droite, passés les 30 degrés d'André… Il bouche ainsi 60 degrés à lui tout seul, il ne pourrait y tremper la main sans se brûler un peu. Sur ma gauche je ne pourrai tirer, vu les trende degrés que je dois au dernier nain, loin là-bas ... Une étroite bande me reste mais c'est là que la probabilité est la meilleure de voir arriver le ou les sangliers. Après avoir beaucoup peiné, c'est le lancer … Rapidement le sanglier, qui serait seul selon radio-battue, est dans le U magique, mais invisible dans les broussailles, bosquets et arbustes, et suivi à cinq ou dix minutes par deux chiens. Et je surveille « mes » drailles sécuritaires. La base du U, si elle avait été rapprochée de la micro colline permettrait de tirer derrière soi avec un peu plus de sérénité peut-être.
Deux détonations dans la même seconde ou presque, et je vois voler le cul du sanglier qui finit sa vie dans une superbe orbe. Ben voilà, toujours pareil, il était quarante mètres trop à gauche, ce sanglier. Et Francis tellement sûr qu'il passerait là ...
Au poste suivant, j'ai un bout de chemin de terre embroussaillé à surveiller, rien n'y passera. Mon chef de ligne enfume un sanglier à 500 mètres de moi environ. Trois sangliers passent de vie à trépas à des distances telles que je ne peux que suivre l'action crachotante par radio. Pierre, lui, est sur site, mais ne verra pas les sangliers. Il s'emplira les oreilles de la menée qui fut terrible, paraît-il. Un chien sera blessé sérieusement au ferme.
Dernier épisode près de la rivière … et de l'autoroute. Nous avons établi un ligne qui coupe la vallée, et c'est par un ferme de quinze minutes que la chasse commence. Puis c'est le lancer et cela vient pour nous, mais une pétarade inattendue se produit, mortelle pour les deux animaux. Il y a avait des chasseurs entre le point de lancer et notre ligne ? Je ne saurai pas ce qui s'est passé et pourquoi. Là aussi tirer était fort mal commode pour moi avec l'autoroute tel un ruban à moins de 500 mètres, et j'avais réduit mon champ de tir à pas grand-chose.
dernier poste ... le trait rose indique le tracé de l'autoroute, la flêche bleue une draille
Il me reste à cuisiner. J'ai rapporté deux têtes de sanglier, un foie aussi pour de futurs pâtés, et quelques kilogrammes de venaison. Des sensations très mêlées aussi. Peut-il y avoir un partage presque équitable des chances de tir sans que les postes soient tirés au sort ? Le biotope y est fabuleux, les sangliers y sont nombreux, les âges sont mélangés, les gens y sont sympa ... Mais on va de zéro à 20 sangliers par chasseur chez nous cette saison. 20, ce n'est pas moi, vous avez compris ... Je ne suis pas certain d'avoir connu saison globalement aussi nulle que celle-ci.
y a encore de belle histoire a écrire nous on c est régaler en tout cas 
